dimanche 17 janvier 2010

V- REFORME & REBELLION: Expatriation

Le Grand Lapin se rendit rapidement compte de l’effet qu’avait eue l’intervention des trois rebelles, et qu’il lui fallait prestement réagir s’il ne voulait pas perdre le profit de son beau discours et de sa non moins belle réforme ! Dans le micro-carotte réglé à fond, il se mit à crier, à en faire faire des arrêt cardiaques aux mamies lapines, et à en faire peur aux bébés lapereaux :

« Lapins ! N’écoutez pas ces trois lâches qui ont peur de changer leur vie de peureux ! Ils veulent nous carotter avec de beaux discours, mais ils oublient que Beuzbeuny veille sur nous, et en particulier sur le Grand Lapin, et le Grand Lapin, c’est moi ! Comment donc aurais-je pu créer une mauvaise réforme, puisque Beuzbeuny lui-même était avec moi ? Lapins, je sais que vous en avez assez d’être tout le temps cachés dans vos terriers, je sais que vous craignez les Tête-en-l’air, je sais que vous ne voulez plus de cette vie ! Alors, mettez-vous de mon côté, acceptez la réforme, et redressez les moustaches ! Tout cela va changer ! »

            Tous les lapins, aveuglés par les brillantes et rassurantes paroles de leur chef, se remirent, un à un, dans le droit chemin, du moins dans le chemin déroulé en tapis rouge-sang par le Grand Lapin, et, l’union faisant la force et le nombre faisant l’exclusion, ils se mirent à huer le petit Gouin et ses deux amis qui les avaient fait douter un instant (rien qu’un petit instant, et encore, c’était pour de rire !…) ! Le Grand Lapin sourit de ses deux dents, et, pour asseoir définitivement sa puissance, se résolut à un coup d’éclat : il prit une paire de ciseaux puis, sous les yeux déjà adorateurs de ses concitoyens, il tailla, souverainement, ses deux longues et belles oreilles noires qu’il saisit et brandit triomphalement, en clâmant :

« Ralliez-vous à mes oreilles noires ! »

            Dans le Terrier des Fêtes, c’était la folie ! Les lapins, conquis une fois pour toutes par ce geste épique, hurlèrent « Vive le Grand Lapin ! », et autres bêtises de ce genre, pour marquer leur désormais dévôte fidélité à leur Réformateur. Celui-ci savoura cette gloire inespérée quelques instants, il en avait bien le droit, après tout, car il avait bien mal aux oreilles, puis il se tourna vers le trio anarchistes en disant :

« Quant à ceux-là… »

            Les visages des lapins se tournèrent vers les individus désignés en les dévisageant d’un unique oeil collectif empli de rien et surtout de méchanté inconscience, et attendirent la sentence qui n’allait pas manquer de tomber…

« Quant à ceux-là…, reprit le chef des lapins, ceux-là… Lapin Gouin, Lapin Tad, et Lapine Eupe, je vous bannis de la forêt des Deux-Dents ! »

            De derrière le Grand Lapin jaillit une boule sautillante et nerveuse, plus proche du rat que du lièvre: le Ministre du Dedans des Deux-Dents, resté jusque là dans l’ombre de son bon et super mentor. D’un geste péremptoire et quasi-prestidigitatoire, il fit apparaître deux Lapins Bleus armés de bâtons qui, au milieu d’un silence mortel et de deux rangées de peluches médusées et moutonnifiées, accompagnèrent nos amis Tad, Gouin et Eupe sur le chemin empaillé de la sortie, pour un aller simple, gratuit mais sans retour, vers l’extérieur des Deux-Dents…

            Le Ministre Raskyzo –c’était son lagonyme- les suivit jusqu’au pas du trou (du terrier), attendit leur disparition manu-militarisée, puis se mit à courrir à petites foulées autour d’un arbre…
Wikio

1 commentaire:

Unknown a dit…

hummm un lagonyme...intéressant !